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PARI GAGNÉ POUR EZIO BARTOLOZZI, PATRON DE D’ISANTO : « LA COMPÉTITION EST NOTRE CARBURANT ».


L’écurie D’Isanto a présenté lundi soir ses bolides flambants neufs pour le prochain Paris-Dakar. Des engins tout en puissance qui montrent, après l’échec cuisant de la saison 2018, la volonté du fabriquant d’affirmer un objectif ambitieux de victoire totale sur ses concurrents. Son patron, Ezio Bartolozzi, a martelé tout au long de la cérémonie combien la compétition est pour lui un élément essentiel de progrès et de dépassement. Par Stéphane Le Gallo. 


©Pauline Fargue 


Lundi dernier, Ezio Bartolozzi n’a pas boudé son plaisir. Le patron de D’Isanto semblait même aussi rutilant que ses motos ! C’est en effet plein de fierté qu’il a évoqué la saison à venir. Oubliés, les déboires de l’année passée, avec notamment l’abandon du champion de la marque, Stefan Gütenberg, suite à une blessure lors du GP18, puis en plein milieu du Paris-Dakar, après un embourbement fatal. « Oui, c’est vrai que l’année dernière a été mauvaise pour nous, mais le propre des grands est de savoir rebondir. C’est ce que nous avons fait. Je crois que nous avons su apprendre de nos erreurs. Nous avons peut-être pêché par trop de légèreté, Stefan dans son domaine, et moi dans le mien. Mais je peux vous assurer que ce qui est ressorti de   la  remise à plat de nos méthodes de fabrication et de notre technologie va en dérouter plus d’un. J’attends les prochains rendez-vous mondiaux avec impatience ! » Et il est vrai que malgré ses yeux noirs, sa barbe de trois jours et son cigare à la bouche, le propriétaire du constructeur peut prendre un air d’enfant émerveillé. Il reconnaît volontiers que la course est sa passion depuis toujours. Ce soir-là, à le voir, nul doute qu’elle est intacte. 


Sur la poursuite de la collaboration avec Gütenberg, le patron est toutefois plus discret. On ne saura pas si le contrat a été renouvelé pour cette saison. Le grand patron nous l’assure aujourd’hui : « ce qui fait la différence, ce ne sont pas les hommes seuls, c’est une combinaison subtile et unique entre l’homme et la machine. Et cette osmose, mon travail est de la rendre possible. Notre marque est unique. On la choisit à la fois pour sa sophistication et sa force. Sa performance réside dans ce style inimitable. C’est à cela que nous avons beaucoup réfléchi après les dernières compétitions. Nous nous sommes demandé : qu’est-ce qui fait l’identité D’Isanto ? Nous avons répondu à cette question et nous avons choisi de nous appuyer sur ce que nous faisons de mieux. Nous avons su renouveler la marque sans la trahir, au contraire : nous l’avons sublimée. »

Cette capacité à rebondir, Ezio Bartolozzi dit la devoir à ses échecs. Les nouvelles motos lancées pendant la cérémonie sont là pour épouser toutes les routes, tous les terrains qu’il faudra traverser. Nous n’avons laissé aucune place au hasard. Vous verrez, soyez patients, vous ne serez pas déçus ! » 


Malgré son sens du suspense, il accepte cependant de nous donner quelques clés de compréhension de ce qui est pour lui une véritable philosophie de la course. C’est cette compréhension intime de la compétition et de ce qui permet aux hommes comme aux machines de dépasser leurs limites qui a permis une reconnaissance internationale : « Le cœur d’une course, c’est la capacité du véhicule à améliorer ses performances de manière continue, c’est à dire sans perte d’énergie inutile, sur un terrain inconnu. Si on est capable de construire des machines qui répondent à cette exigence, on est capable de gagner tous les championnats du monde. C’est aujourd’hui le cas. »  


Bartolozzi avoue sans peine s’être inspiré des marques concurrentes et avoir étudié leurs performances. « Bien sûr qu’on peut acheter leurs motos, tout démonter, mesurer, tout étudier. La technologie est connue. Mais c’est ailleurs que ça se passe. Une écurie qui marche, c’est une alchimie entre des équipes, un chef, des ambitions, des moyens… Il y a un moment où la technologie ne suffit plus. La course, c’est un monde à part. Regardez : ici on a tous atteint des niveaux incroyables. Donc, si vous voulez survivre, si vous voulez rester le plus fort, vous devez aller plus loin. Inventer. Avoir votre propre touche. Vous rendre inimitable. » Puis, dans un grand éclat de rire, il ajoute : « Ça, je peux le dire tout haut, je ne risque rien ! »


En effet, en 10 ans, D’Isanto a développé des méthodes spécifiques d’innovation. Pour le seul département de course, l’entreprise emploie 150 techniciens-chercheurs. Un tel investissement est unique dans le milieu de la construction de motos de course. Ainsi, l’engin que Bartolozzi nous présente – un magnifique SB P4R rouge, large et aux lignes épurées, qui est cette année le poulain de la marque – représente, selon ses dires, le résultat de milliers d’heures de travail. « Ces techniciens travaillent en permanence  avec le département de production, au point qu’on a pris l’habitude d’organiser des échanges de collaborateurs. Et vous savez quoi ? Des découvertes ont parfois été faites à la cantine du siège, parce que des techniciens des deux départements avaient lié connaissance ! C’est ça, l’aventure humaine D’Isanto. »  


Ezio Bartolozzi termine cependant en insistant sur le prestige de la marque, véritable garantie de qualité et de réussite. « Nous avons aussi su exporter notre savoir-faire. Nos nouveaux terrains de découverte sont en Asie. Nous pouvons le faire parce que notre marque est et reste une référence en matière de course. Mais il était primordial de donner des signes de renouvellement et d’ambition. Je pense que nous y avons réussi. » Quand on sait que l ‘écurie D’Isanto a signé au cours de l’année 2018 plus de 25 millions de dollars de nouveaux contrat hors de l’Union, on ne peut qu’acquiescer.